MAY IN CASA, Jour 1
Jour 1 / Dimanche 8 Mai 2022
C'est
le jour J, il est 8h, je tente de terminer ma valise en m'habillant,
alors oui ça fait des mois que je connais les dates et que j'aurais
pu anticiper ben justement non, trop de choses sont tombées dans mes
pattes cette semaine alors voilà. Et puis j'aime bien pas trop
réfléchir et prendre les choses comme elles viennent, sans trop
préparer, fantasmer, s'angoisser. Comme ça je ne stresse que le
jour j, c'est ma technique en somme.
Sauf que voilà j'ai
loupé mon bus, ils ont dit une heure avant le vol pour embarquer,
c'est toujours pareil, je suis à la bourre, auto-sabotage, rate au
court-bouillon, etc. Deux bus et hop, me voilà à l'aéroport de
Mérignac, trouver la bonne file, laisser sa grosse valise en soute,
rien comprendre à ce qu'on me dit car peur de louper le vol alors
que j'ai une heure d'avance. Enfin on
arrive devant le tapis roulant de l'enfer et ses vérification de
bagage à main, où je sais déjà que j'ai du zapper des trucs et
que ça va pas le faire et ça loupe pas, la paire de ciseaux
planquée au fond de la trousse, la gourde bien pleine qui passe pas,
"il faut la boire ou vous reprenez vos affaires et allez la
vider dans les toilettes derrière", et vas-y cul-sec le litron
d'eau ça tombe bien j'avais pas déjà envie de pisser. Et encore
une file avec le contrôle des papiers, et on attend. Et puis l'avion
arrive, on va tous se coller-serré, je me rends compte que j'ai
vachement moins mal aux oreilles et moins peur au démarrage et à
l'atterrissage que par le passé, y aurait-il un avantage à vieillir
en fait?
La magie des fuseaux horaires qui donne l'impression
d'avoir remonté le temps, deux heures de vol mais une seule heure de
plus à l'arrivée.
Et puis … l'aéroport de Casa.
Le
truc immense que t'as pas vu venir, avec un monde fou qui grouille.
Et on recommence les files d'attente, et un contrôle des papiers
avec plein de questions sur ce que je viens faire là avec un bel
interlocuteur un poil joueur quand il voit que ses questions me font
paniquer. Légèrement troublée, je repars et là c'est le dédale,
de salles en halls immenses, de couloirs en sas, à la recherche du
spot aux bagages. Mais évidemment ici il n'y a pas UN tapis roulant
qui chie les valises mais DIX, alors va trouver le bon, heureusement
j'ai des potes d'avion qui m'aident et cherchent "la valise
rouge au foulard à pois". Merci tellement Sol pour la valise et la bonne
idée. Et puis on se sépare, je pars courageusement à la recherche
de celui qui m'attend pour m'amener à l'hôtel, quelque part, là
dehors où il y a mille gens. Le nom que j'ai noté n'est pas clair,
bus de tourisme ou chauffeur de taxis, où le trouver bordel. Aller
vers les parking à taxi sans trop savoir quoi/qui chercher, essayer
de ne pas montrer son hésitation/ désarroi en adoptant un pas sûr
et décidé, être trahi par ses valises et ses yeux qui
papillonnent désespérément. Une chaleur écrasante qui brûle la
couenne. Un, puis deux puis trois types qui veulent m'aider ou/et
m'embarquer dans leur taco, finir par se retrouver avec 2 gars sur 3
qui appellent mon chauffeur, qui en fait m'a vu passer sans que je
vois mon nom pourtant écrit en gros entre ses mains.
Et là,
tout s'apaise; le chauffeur attrape mes valises, il traverse les
parking et les foules d'un pas tranquille, je le suis sagement en
trottinant, on arrive à sa grosse voiture noire, il m'ouvre la
portière, un mini salon se cache dans cette caisse, je me love dans
une banquette. On discute un peu, il m'apprend quelques mots d'arabe
puis met de la musique. Je regarde le paysage, mon regard croise des bâtiments entre
splendeur et désolation comme des début de grandes demeures
abandonnées prématurément, bordées de palmiers et de dattiers,
cette ville semble immense et protéiforme. On arrive à l'hôtel. Il
n'y a pas foule, je découvre plus tard que nous ne sommes que deux
clients aujourd'hui. Il est tôt, il faudrait que j'aille retirer,
que j'aille découvrir la ville…
La chambre est un peu comme
une île inespérée au milieu des flots, pourquoi courir rien ne
presse. Et puis il y a une piscine et un restaurant, alors. Certes,
la piscine est à l'intérieur et je suis alone, pour le côté
estival festif on repassera mais pour la détente, le plaisir de
faire des longueurs en solo jusqu'à l'épuisement c'est parfait. J'ai
faim, je vais rôder vers le resto de l'hôtel mais on me dit qu'il
ouvre dans 1h30, je regarde la carte composée exclusivement de
protéines animales, mon œil recommence à papillonner, le tenancier
s'en rend compte et me demande ce que j'aimerai, je balbutie que je
rêve de tajine aux légumes et il me dit qu'il va me trouver ça.
Je fais quelques pas dehors, la petite angoisse née ce matin fini par me quitter. Moins d'une heure plus tard, le maître d'hôtel
m'appelle pour me dire que mon plat est servi, je descends, attention
c'est chaud ne vous brûlez pas, il hôte le couvercle en terre du
tajine, un délicieux fumet s'échappe, carotte, fenouil, pomme de
terre et courgette caramélisées dans des épices teintés de ce
jaune sublime, pourtant ni le curcuma ni le safran ne sont
identifiables, la saveur est incroyable c'est le bonheur.
Il
est 22h, j'ai préparé mes devoirs pour demain.
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